L’Apocalypse, une fois encore, semble imminente. Omniprésente dans l’art et les médias, elle attise la peur de l’Homme la plus grande : celle de sa fin. La prophétie révèle pourtant un tout autre message à redécouvrir. Il donne foi en l’avenir.
Prophéties de la fin des temps
La plupart des mythologies et des religions prophétisent une fin pour le Monde et l’humanité. Il existe néanmoins deux grandes manières de l’entrevoir : d’un côté, la conception indienne ou platonicienne qui influence de nombreux mythes grecs ; de l’autre, celle partagée par les traditions iraniennes, nordiques, judaïques, islamiques et chrétiennes. Selon la première, la fin répond à des lois immuables et cycliques qui régissent toute chose dans l’univers. Une fin s’annonce lorsque l’ordre cosmique est trop perturbé pour pouvoir naturellement se rééquilibrer. Seule la destruction et le retour au chaos des origines peut alors permettre la naissance d’un nouveau cycle dans un monde régénéré. Pour la doctrine hindoue, ce déroulement se divise en quatre âges qui traduisent un obscurcissement graduel de la spiritualité primordiale à partir de l’âge d’or originel jusqu’à l’âge noir, le Kali Yuga (l’âge actuel). Dans la seconde hypothèse, un ou des dieux décident seuls de mettre un terme à ce qu’ils ont eux-mêmes créé. Il existe non pas des fins multiples dans un cycle d’éternel recommencement mais une fin unique. L’Histoire s’accomplit linéairement et se termine par un affrontement final entre les forces du Bien et du Mal, suivi le plus souvent par un jugement dernier des âmes. Les premiers textes y faisant référence se nomment en Iran, l’Avesta (mazdéisme) et le Bundahishn (zoroastrisme) ; dans la mythologie nordique, la Völuspa.
La tradition judéo-chrétienne se réfère quant à elle à plusieurs récits de la fin des temps mais l’Apocalypse – qui signifie en fait révélation -, demeure le plus connu. Ses grands prophètes se prénomment Isaïe, Ezéchiel, Zacharie et Daniel chez les hébreux ; Marc, Jean ou Paul (dont l’Apocalypse gnostique ne fut redécouverte à Naag Hamadi qu’en 1945) chez les chrétiens. Même si, après eux, de grands mystiques (Gerbert à la fin du 1er millénaire, Joachim de Flore au 13ème siècle, Saint Malachie…) ou des philosophes-astrologues tels Nostradamus n’auront de cesse de formuler d’autres prophéties.
Signes d’une fin imminente
On comprend alors facilement pourquoi les croyants cherchent inlassablement à fixer la date exacte de l’anéantissement. En Occident, tout comme au passage de l’an mille au Moyen Age déjà annoncé par beaucoup comme la fin, plusieurs mouvements spirituels dénommés millénaristes le prédisent pour l’an 2000 ; d’autres s’appuyant sur le célèbre calendrier maya, pour 2012. Mais, l’interprétation qui tend à appliquer les différents signes d’une prophétie à des événements précis de l’histoire, une fois encore, se révèle fausse. Ce qui semble au final normal car tout texte sacré se doit de demeurer mystérieux afin de pousser l’homme à faire l’expérience de sa parole vivante, quel que soit le lieu et le temps. Si, comme l’évangile de St Mathieu le rappelle, « seul Dieu connaît le jour et l’heure », l’étude des croyances entourant les fins dernières du monde – l’eschatologie – confirme néanmoins que toutes décrivent des signes annonciateurs permettant de s’y préparer. La tradition indienne, par exemple, dépeint l’âge d’avant la fin comme un monde où seule la richesse détermine la valeur sociale et où l’égoïsme règne en maître ; la luxure y est l’unique but des couples et la religion, pour ceux qui la pratiquent encore, ne s’envisage que comme une simple formalité. Platon, dans plusieurs de ses écrits, évoque lui aussi cette déchéance morale régnant en Atlantide avant sa destruction, de même que de très nombreux mythes du Déluge (le plus ancien connu remontant aux sumériens, au 12ème siècle avant J.C.). La discorde qui règne entre les peuples se voit également fréquemment mentionnée, de même que les catastrophes naturelles et les phénomènes extraordinaires tels l’obscurcissement du soleil ou la chute d’étoiles. C’est pourquoi, longtemps, les hommes interprétèrent ces derniers comme des signes annonciateurs d’une fin imminente.
L’Apocalypse de St Jean
L’Apocalypse de Jean écrite vers 96 après J.-C. figure comme le texte de référence pour les chrétiens. Dernier livre du Nouveau Testament, elle dépeint en 22 chapitres la vision que le Saint aurait eu en exil sur l’île grecque de Patmos. Enoncée dès les premières lignes comme celle de Jésus Christ, cette révélation montre à l’apôtre ce qui doit arriver afin qu’il en témoigne. Elle raconte l’histoire de notre monde chuté et, lorsque les cieux s’ouvrent, évoque celle du monde divin. C’est pourquoi elle s’inscrit à la fois dans un temps humain linéaire et dans un temps céleste, un éternel présent. Le récit se structure en trois parties : une première ‘’historique’’, une seconde consacrée à l’œuvre du diable et la troisième dépeignant la fin. Dans cette dernière partie, l’Apocalypse nous parle de ce même état chaotique de la Terre et de l’humanité. Elle mentionne 4 événements majeurs devant se produire : le retour du Christ – figure du Bien (symbolisé par l’Agneau) qui combat et triomphe du Mal (le Dragon et ses bêtes) ; la résurrection des morts ; le jugement dernier des morts et des vivants puis la séparation entre ceux qui seront sauvés ou damnés pour l’éternité. Contrairement à ce qu’il est coutume de croire, l’Apocalypse ne nous parle ainsi pas que de destruction ; elle répond aux grandes questions métaphysiques que l’homme peut se poser sur sa nature et le sens de son existence. Elle évoque son origine, sa chute progressive dans la matière autant que son devenir radieux après un éveil. Si la Révélation prédit une funeste destinée pour la Terre au cas ou les hommes refusent de changer, elle laisse également entrevoir que Dieu n’abandonne jamais ce qu’il a créé. L’Apocalypse ouvre les yeux, laissant à chacun sa liberté de choix. A celui qui s’éveille, elle apporte « la consolation de l’Esprit ».
Une histoire symbolique
La prophétie de Jean fascine depuis toujours. Certainement parce que ses puissantes images tout comme son langage énigmatique laissent libre cours à de multiples interprétations possibles. Pour nous aider à la comprendre, l’ange de l’Apocalypse délivre son message au travers de 7 septénaires ; le 7 désignant symboliquement l’accomplissement d’un cycle complet. Ainsi :
- 7 lettres aux 7 communautés chrétiennes – l’Eglise dans son ensemble – dénoncent tout d’abord l’obscurcissement de la connaissance du divin mais le Christ apparaît et toutes le reconnaissent comme le Sauveur (la vision céleste de l’Agneau sur le trône).
- le Livre aux 7 sceaux, ouverts par le Christ l’un après l’autre, décrit la situation de l’humanité confrontée à la violence, à la guerre, à la famine et à la maladie (les 4 cavaliers de l’Apocalypse). Il explique comment le diable a perverti l’esprit humain et l’a progressivement fait chuter dans le matérialisme et l’individualisme ; ce qui finit par susciter la colère de Dieu.
- 7 trompettes sonnent l’arrivée des premiers fléaux infligés au monde où règne Satan et ses anges : la destruction partielle de la terre, le début de l’empoisonnement des mers, des sources et de l’atmosphère puis, avec l’ouverture des forces des abîmes, les destructions engendrées par ceux qui divinisent la science et la machine, violant les lois de la matière et de la vie.
- 7 signes énoncent les enjeux du combat spirituel : l’importance du féminin sacré dans le processus du salut (la femme vêtue de soleil) ; le nécessaire combat pour que triomphe le Bien sachant que le Dragon et ses bêtes ne cessent de séduire les hommes en leurs offrant tout ce qui peut les détourner de Dieu (pouvoir politique aux faux rois, fausses idéologies, fausses richesses, faux prophètes). Malgré les premiers avertissements, l’humanité préfère adorer la bête. Dieu ordonne alors la moisson et la vendange tout en protégeant ses fidèles serviteurs.
- 7 anges déversent 7 coupes pleines de sa fureur (maladies incurables, pollutions des mers et des eaux douces, sécheresses, obscurcissement du soleil, tremblements de terre, tempêtes de grêlons) ; les hommes en souffrance s’en prennent alors à Dieu.
- 7 paroles expliquent pourquoi Babylone, la grande cité, « mère des prostituées et des abominations de la Terre », se voit condamnée et disparaît ; ses adorateurs qui se lamentent à sa suite.
- 7 visions dépeignent dans le 7ème septénaire la phase finale de l’accomplissement : le triomphe du Christ sur le Mal de même que le Salut pour les élus qui unis à lui (les noces de l’Agneau) voient apparaître un nouveau ciel et une nouvelle terre (la Jérusalem céleste).
L’Apocalypse dans l’art sacré
Dans l’art sacré, jusqu’à la fin du Moyen Age, l’Apocalypse de Jean se retrouve souvent mise en images. Certains artistes illustrent le récit entier ; d’autres se concentrent sur une scène particulière ou tentent de réunir dans une seule œuvre plusieurs épisodes en même temps. Quelques figures s’imposent comme des sources majeures d’inspiration : l’ange de l’Apocalypse, l’Agneau, la femme vêtue de soleil, la Bête (aux formes multiples), les 4 cavaliers, la prostituée de Babylone ; les thèmes du trône de Dieu, des 7 sceaux, du lieu de l’affrontement final – Armageddon -, du Jugement Dernier et de la Jérusalem céleste également. Dans l’étude Peindre l’Apocalypse, Natasha et Anthony O’Hear dressent une liste des chefs-d’œuvre artistiques sur le thème. A savoir et par ordre chronologique :
- l’Apocalypse de Trèves : un manuscrit du nord de la France du début du 9ème siècle somptueusement enluminé de 74 images et, comme souvent à l’époque médiévale, produit pour un usage dévotionnel ;
- les Beatus : l’Apocalypse haute en couleurs des 26 manuscrits réalisés entre le 9ème et le 12ème siècle en Espagne. Les moines l’utilisent alors dans la pratique de la lecture sainte (Lectio divina) de même que, lu à voix haute, pour la liturgie entre Pâques et la Pentecôte.
- l’Apocalypse anglo-normande : produits à partir du début du 13ème siècle en Angleterre, ses 20 manuscrits aux enluminures très détaillées inspirent de nombreux artistes durant tout le Moyen Age ;
- l’Apocalypse d’Angers : une tenture monumentale de 84 scènes commandée par Louis 1er d’Anjou au 14ème siècle ; le plus important ensemble de tapisseries médiévales subsistant au monde ;
- l’Apocalypse de flamande produite vers 1400 : la première œuvre qui accorde une place centrale aux images par rapport au texte (22 au total) ;
- le retable de Gand : un polyptique de 24 tableaux des frères van Eyck datant de 1432 dont le panneau central représente la Jérusalem céleste d’une manière non conventionnelle ;
- le triptyque de Saint Jean : une œuvre d’Hans Memling de 1479. Elle réunit pour la première fois en une seule image différents événements de la vision de l’apôtre ;
- la série de gravures sur l’Apocalypse du 16ème siècle d’Albrecht Dürer qui juxtapose en une même image le royaume céleste et l’espace terrestre, ou celle de Lucas Cranach qui illustre l’interprétation luthérienne du texte de la Révélation.
A partir du siècle des Lumières, ce thème devient par contre rarement abordé dans l’art sacré. Depuis le 20ème siècle, il arrive qu’il suscite néanmoins parfois l’intérêt d’artistes reconnus (l’Apocalypse de Joseph Forêt en 1960 illustré par Dali, Mathieu, Foujita… ; la peinture murale monumentale de François Peltier pour le cloître de Saint Emilion, en cours de réalisation). Ces dernières années, de nouvelles formes littéraires à succès réinventent de même le récit biblique imagé, redonnant à la prophétie toute sa puissance dramatique (l’Action Bible en bande dessinée, la Manga Bible).
L’Apocalypse dans l’art profane
L’Apocalypse demeure longtemps associée à la Révélation. Dans l’art profane, les grands artistes qui s’y réfèrent l’entendent encore dans un sens sacré (Blake, Turner, Martin, El Greco…). Mais, au début du 20ème siècle, le terme entre dans le vocabulaire du quotidien et commence alors à s’envisager uniquement négativement. Des peintres modernes l’associent tout d’abord à l’horreur des deux premières guerres (Dix, Beckmann, Kieffer) ; dans les années 50, d’autres artistes à la Guerre froide puis à celle du Vietnam (Apocalypse Now de Coppola en 1979). A partir des années 60, des auteurs et des réalisateurs de science-fiction s’inspirent des grands fléaux décrits dans l’Apocalypse afin de nous alerter sur une fin imminente probable ou nous projeter dans un avenir proche qui lui ressemble (les genres dystopiques cyberpunk et biopunk qui interrogent les technologies de l’information ou la biotechnologie). Si les hommes prennent pour la première fois conscience d’une autodestruction planétaire vraisemblable suite au bombardement nucléaire d’Hiroshima (Le Monde, la Chair et le Diable de McDougall en 1959, Point limite de Lumet en 1964), d’autres causes ne cessent par la suite d’hanter les œuvres littéraires et cinématographiques. Par exemple : la suprématie de la machine et des technologies d’information (Le Neuromancien de Gibson en 1984 considéré comme le premier roman cyberpunk, le manga Ghost in the Shell adapté au cinéma en 2017 par Sanders, Dune d’Herbert en 1965, Blade Runner de Scott en 1982 tiré du roman de Dick) ; les phénomènes extraordinaires (Armageddon de Bay ou Deep Impact de Ledder en 1998) ; les catastrophes naturelles liées à la violation de la nature (le cycle des 4 Apocalypses par les 4 éléments de Ballard dans les années 60) ou encore les pandémies (Phénomènes de Shyamalan en 2008, Contagion de Soderberg en 2011). De nombreux plasticiens nous alertent eux aussi sur les menaces encourues à trop diviniser la science et la machine (les frères Chapman, Bull, Cattelan, Huyghe…). Cette interprétation du récit biblique se propage de même grâce aux médias puis aux réseaux sociaux qui, se jouant de nos peurs, utilisent souvent l’Apocalypse pour commenter toutes sortes d’événements historiques (la couverture du magazine Daily Mail du 12 septembre 2001 avec les Twins towers, la campagne Avaaz internet apocalypse de février 2014…).
Les artistes-prophètes des temps modernes entrevoient au départ encore une fin de la Terre évitée de justesse ; dans les films catastrophes, le plus souvent grâce à un ou quelques hommes héroïques (Le Jour d’après en 2004 ou 2012 en 2009 d’Emmerich). Mais, dès les années 80, les contemporains commencent à porter un regard bien plus pessimiste et désenchanté sur notre destinée. Depuis peu, pour nous parler du jour fatal, des réalisateurs tentent néanmoins une autre approche, plus intimiste. Certains, comme l’avait déjà fait Bergman en 1957 dans son film culte Le 7ème sceau, explorent le ressenti des hommes face à ce moment singulier (Melancholia de von Trier en 2011, Take shelter de Nichols en 2011, Les derniers jours du monde des frères Larrieu en 2009) ; d’autres, sur un ton plus léger, interrogent leurs comportements (Jusqu’à ce que la fin du monde nous sépare de Scafaria en 2012, C’est la fin de Rogen et Goldberg en 2013).
Le monde d’après
Pour l’art profane, le monde d’après ou à venir – une terre dévastée où les pires instincts prédominent – ne réserve aux hommes que très peu d’options possibles : une vie d’errance pour survivre (Je suis une légende de Patheson en 1954, le 1er grand roman post apocalyptique adapté à l’écran en 2007 par Lawrence, Les Fils de l’homme en 2006 de Cuaron, La Route d’Hillcoat en 2009, la série The Walking Dead depuis 2011) ou une vie d’esclave dans des lieux préservés totalitaires (La Servante Ecarlate d’Atwood en 1985 et sa série à succès en 2017, l’armée des 12 singes de Gilliam en 1996, The Snowpiercer par Joon-hoen 2013, Hunger Games de Ross en 2012 ) ; une vie en exil dans un espace hostile (Oblivion de Kosinski ou Elysium de Blomkamp en 2013, Interstellar de Nolan en 2014) ou bien encore une seconde vie virtuelle pour oublier la ‘’vraie’’ dans un monde imaginaire (The Congress de Folman en 2013, Ready Player One de Spielberg en 2018). De sombres scénarios que ne cessent également de mettre en scène de nombreux jeux vidéos (Apocalypse, City of Heroes, Gears of War…). Dans cette vision de l’Apocalypse sans Dieu ni voie de salut possible, difficile d’espérer un avenir radieux, à part peut-être pour les élus de la franchise à très gros succès Les survivants de l’Apocalypse (the Left Behind) adaptant la série de 13 nouvelles des évangélistes LaHaye et Jenkins (elle-même largement inspirée par le récit biblique).
Le monde qui vient
Pour ceux qui croient encore en un ordre divin, la fin s’envisage en revanche tout autrement. Comme Jacques Lacarrière le souligne dans Au cœur des mythologies, « la plupart prophétisent, après le grand Jugement ou le grand Combat, l’apparition d’un monde nouveau, régénéré et débarrassé à jamais des forces et des esprits du Mal ». Selon les périodes et les communautés, ce monde qui vient s’interprète néanmoins différemment. Dans le monde chrétien, on l’envisage comme la restauration de la vie sur cette terre (les mouvements millénaristes) ou comme une transformation de l’homme vivant dans un nouveau corps – un corps glorieux – sur une nouvelle terre et de nouveaux cieux (couramment associés au paradis). Pour les catholiques, l’Eglise s’impose comme un intermédiaire nécessaire ; pour d’autres, souvent traités d’hérétiques, cette transformation de passage s’envisage dans une relation directe à Dieu (les gnostiques…). Certains considèrent de même qu’elle peut se vivre, à titre individuel, sans attendre la fin (la transmutation alchimique dans l’Hermétisme ; la transfiguration chez les ésotéristes chrétiens…).
L’Apocalypse de Jean décrit pour sa part ce monde qui vient – la Jérusalem céleste – à la fois tel le jardin d’Eden et une cité divine. C’est pourquoi, pour la dépeindre, les artistes préfèrent généralement traiter l’un de ces deux thèmes ou, comme au Moyen Age, réaliser différentes représentations de la vision. La Jérusalem nouvelle se révèle en premier lieu descendant du ciel « comme une épouse qui s’est parée pour son époux ». Cité éternelle, elle n’est plus soumise aux lois cycliques du 7 ; durable et stable, elle se structure en carré par le 12 (12 portes, 12 assises, 12 anges, 12 apôtres…). L’Agneau en son centre remplit par sa lumineuse présence la ville sainte autant que ses élus. Jardin du Paradis où coule un fleuve d’eau vive et pousse l’arbre de vie, elle est terre d’abondance, de paix et d’harmonie. Mais contrairement à l’âge de l’innocence du début des temps, seuls les hommes ayant choisi de s’unir à Dieu y vivent, uns avec lui.
L’Apocalypse de Jean révèle ainsi un message d’espoir méconnu et rarement abordé dans l’art actuel. Sa post humanité semble, à choisir, bien plus optimiste que celle envisagée par les ‘’néo-prophètes’’ d’aujourd’hui. Tous ceux qui, subvertissant son symbolisme sacré, nous promettent : l’éternité par l’hybridation avec la machine ou l’intelligence artificielle (I’m your man de Schrader en 2021, Her de Jonze en 2013, Transcendance de Pfister en 2014), une vie de jouissance par la mutation du corps dans une Babylone post apocalyptique (Les crimes du futur de Cronenberg en 2022) ou bien encore un paradisiaque monde d’après virtuel dans l’oubli de notre être (les oeuvres de jeunes artistes tels Bliss, Pieces of Me, Serpent of Self de Pussykrew, The Journey d’AXL Le, The Gate ou Celophane de Huang). Heureux ceux qui s’ouvrent sans attendre à ce qui est véritablement ; « heureux ceux qui sont invités au festin des noces de l’Agneau » !